Un texte une image – n°4

28 Avr Un texte une image – n°4

Un matin s’est levé

 

28/11/1975 – 28/11/2015

« Un matin s’est levé.

J’ai écarquillé les yeux, repoussé les voiles épais de la nuit,
Regarde,
Regarde, m’as tu dit,
Toi de l’intérieur.
Plus tu vois, plus tu sais, plus tu es lucide,
Plus tu t’interroges, plus tu ne sais pas,
Plus tu cherches, plus tu doutes, plus tu cherches encore.

Regarde,
Regarde, m’as tu dit, toi de l’intérieur.
J’ai peur de savoir.
J’ai peur de voir tout ce qui détruit, disparaît et sombre.
Je cherche un état du Monde qui ne va pas vers la chute.

Ecoute,
Ecoute, m’as tu dit, toi de l’intérieur.
Dans le tumulte, la lutte, tes choix pour contrepoids.
C’est si pénible d’ouvrir les yeux sur le sombre
Et le sang de la terre.
Si pénible d’être balayée d’un instant
Par cette déferlante vague où tout se consume
Rien ne retient l’eau du barrage
Tout s’emporte, se déporte, se perd.
Mettre ses deux poings devant ses orbites affolées.

Pleure,
Pleure, m’as tu dit, toi de l’intérieur.
Tu ne peux contrevenir à la terreur du Monde sans commencer
Par apporter des pleurs.
Tu traverses l’Automne. Toi aussi.
Vient le froid pour le repos.
L’arbre meurt s’il n’abandonne ses feuilles
Pour économiser sa vie.
Pleure, si tout autour est effrayant. Glisse toi dans la tanière du cœur !
Il s’est fait un grand silence.
Puis j’ai écouté le souffle de l’air que je ne connaissais pas.
J’ai appelé l’Immobile en lui demandant de me montrer son visage.
Je veux te voir, je veux comprendre, je veux aider.
Je veux tellement Aider!

Parle,
Parle, m’as tu dit, toi de l’intérieur.
Face à ce qui se détruit tu peux construire tout petit
Le Tout petit des mots qui prend l’immense place
Tout ce qui ne se voit pas, qui est pourtant déjà en la coquille
Et qu’il te faut déposer dans le Monde.

Un matin s’est levé. »

Texte: Claire Brandin​
Photographie: « Life in the wood » – Lemontree images

Claire Brandin
contact@clairebrandin.com
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